Des oxymores pour du bonheur

 

Trois papiers sont distribués. Inscrire sur chacun un oxymore

Faire un pot et tirez au sort cinq oxymores

douce cruauté  /  blanc ébène  /  gentil méchant

silence assourdissant  /  terrible douceur  

Les intégrer dans un texte sur le bonheur

 

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Image de brgfx sur Freepik

 

 

 

Tout le monde l’appelait le gentil méchant ou bien blanc ébène  pourquoi blanc ébène ? il avait un à l’extérieur un beau visage blanc et à l’intérieur une âme noire !!! Il avait 5 ans, il était beau comme un ange mais il faisait sans arrêt des sottises pas toujours sans conséquences ! Comme disaient les gens du petit village :  «  il est si beau qu’on lui donnerait le Bon Dieu sans confession  !!!

Malheureusement ils eurent vite fait de comprendre à leurs dépens que ce doux visage, ces magnifiques yeux verts et ces cheveux blonds bouclés cachaient une douce cruauté.

Il prenait des chatons nouveaux nés et en catimini allait les porter dans un autre jardin éloigné. La pauvre chatte miaulait désespérément et toute la famille cherchaient activement les chatons; Ou bien, il détachait un chien méchant, ce dernier s’empressait d’aller terroriser le voisinage.

Il entrait dans les poulaillers et cassait les œufs fraichement pondus.

Avec une terrible douceur il s’approchait de la vieille Justine, assise sur sa chaise devant  sa porte. Elle était presque aveugle, mais elle le sentait venir. Il faisait mine de la saluer et en  profitait pour lui voler une des friandises qu’elle avait toujours à côté d’elle. Il repartait fou content en croquant dans son larcin.

Il ne faisait pas vraiment le bonheur de ses parents. Il passait ses journées de la sorte, libre comme l’air, sans ami, inventant des bêtises nouvelles chaque jour.

Or un soir, il décida d’entrer dans l’église, il n’avait encore jamais osé !!! Peut-être qu’il pourrait faire une super bêtise, on ne sait jamais !!! un silence assourdissant l’accueillit, un calme fascinant ! Il n’avait jamais ressenti une telle impression ! Il ne sut que penser, aucune idée de sottises ne lui vint à l’esprit, phénomène très rare !! Il s’approcha de l’autel, leva les yeux et vit un homme décharné accroché à une énorme croix. Il y avait du sang sur son corps, une couronne avec de grosses épines sur sa tête!  Cet homme semblait le regarder et il lui … souriait …

Alors un énorme bonheur emplit son petit cœur, il ressortit de l’église transformé et devint un gentil-gentil !!!

Chris

 

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Image par violaine louis de Pixabay


 

 

Ébène et Neige, bonheurs canins

Je promenais mon chien – enfin, je dis mon chien, mais c’est inexact. Ébène était le chien de ma grand-mère Nénette et quand celle-ci nous avait quittés, quelques mois auparavant, tous les regards s’étaient tournés vers moi, m’implorant de le garder avec moi. Je n’aimais pas particulièrement les chiens, mais mon amour pour Nénette et pour la poésie m’avait convaincue. Oui, oui, pour la poésie. Car Ébène est un chien entièrement blanc, un sosie de Milou, et nous avions souvent ri avec ma grand-mère de ce bel oxymore sur pattes – le blanc Ébène.

Je regrettais parfois de l’avoir pris chez moi, dans mon appartement, car ce chien faisait preuve d’une douce cruauté : il était capable de vous accueillir avec des câlins, en vous faisant des fêtes, puis dans la seconde suivante de vous ignorer superbement. Je me demandais si Ébène n’était pas la réincarnation d’un chat. Mais surtout, il était doté d’un tempérament de feu. Il accumulait les bêtises et je ne comptais plus les dégradations de mon intérieur. Mon frère disait de lui que c’était un gentil méchant – ou peut-être un méchant gentil, je ne m’en souviens plus, nous n’étions pas à un oxymore près !

Je promenais donc Ébène comme chaque matin, dans le parc au pied de mon immeuble. Cet endroit bruyant, très urbain, ne lui convenait guère, lui qui n’avait connu que la maison de Nénette, avec son grand jardin, au milieu de la campagne normande et il fallait que je le traîne. Soudain, Ébène se figea, puis redémarra d’un bond et se mit à courir comme un forcené, me traînant à l’autre bout de la laisse – dans ces cas-là, on pouvait se demander lequel de nous deux promenait l’autre. Il accéléra tant que je perdis l’équilibre et m’affalai lamentablement devant un banc. Ébène s’arrêta net, devant un de ses congénères au pelage entièrement noir – qui, je l’appris plus tard, était en fait une congénère, du nom de Neige. L’homme au bout de la laisse de la noire Neige se précipita et avec une terrible douceur m’aida à me relever. Autour de nous, se fit un silence assourdissant.

Désormais, Marc et moi promenons Ébène et Neige, main dans la main, tous les matins et si ce n’est peut-être pas le bonheur, ça y ressemble fort…

Fabienne

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Dès que les projecteurs s’allumèrent, la scène se mit à refléter un blanc ébène impressionnant. « Ca commence bien ! » se dit Muriel. C’était sa première véritable prestation théâtrale. Avec terreur, elle se demanda  ce qu’elle faisait dans cette galère, coincée dans un costume qui menaçait à tout instant de craquer dans le dos. « Oui, bien sûr, il me faut absolument oublier que le noir devant moi est rempli de gens qui vivent, regardent et écoutent…mais je n’y arrive pas, je ne peux que penser : Mon Dieu, je joue devant un public ! Ce gentil méchant public qui va me trouver archinulle ! Ce public qui, avec sa terrible douceur va, sans pitié, me juger pitoyable bien sûr !

    C’est ça qui est affreux. Il ne va pas me lancer des tomates ou des quolibets, non ! Avec sa douce cruauté, il va m’assassiner  sous des sourires ironiques et des mots condescendants  et venimeux ! »

Cet intéressant quoique muet monologue qui venait de se dérouler en quelques secondes à peine, fut brusquement  interrompu, comme par un ordre mystérieux. l Toux intempestives, raclements de pieds et chuchotements furtifs cessèrent d’un seul coup, faisant place à un silence assourdissant.

La comédienne débutante ouvrit alors la bouche et les mots magiques se mirent à couler : « La guerre de Troie n’aura pas lieu, Cassandre. » Et avant même la réplique : « Je te tiens un pari, Andromaque. » Muriel avait disparu. A sa place se tenait Andromaque  cachant dans son cœur un grand, un immense bonheur.

                          El Pé

 

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Wikimédia Par Bernhard — Travail personnel, CC BY-SA 2.5

 

 

Et si la terrible douceur d’un chaleureux rayon de soleil pouvait dissoudre la terne et froide morosité ambiante tapis dans l’ombre ! Et si l’information produite teintée de sympathique colère ou de douce cruauté diffusant des histoires de tendre violence des méchants aux airs gentils, agissant dans l’obscurité brillante du clair de lune, laissait un peu de place aux aventuriers courageux qui œuvrent discrètement loin de la foule à la recherche de la satisfaction d’objectifs ambitieux, source de leurs bonheurs. Cela pourrait redonner espoir pour apprécier les plaisirs de la vie en surmontant les aléas gorgés de souffrance dans un silence  assourdissant.

C’est pour dire que la notion de bonheur est terriblement subjective. Et, quoi ou qui de mieux pour l’illustrer que de rappeler ces fragments de vie de ces aventuriers exceptionnels.

- Sylvain Tesson « avais pris 50 ans en 8 mètres » après s’être complètement fracassé après une chute d’un toit. Il aurait dû renoncer à sa raison de vivre représentant le sel de sa vie, son bonheur ultime consistant à parcourir le monde à pied ou escalader les sommets enneigés. Mais pour se reconstruire, il s’est lancé un défi que le commun des mortels analyserait comme impossible ou extravagant, consistant à traverser à pied en diagonale« les chemins noirs », soit 1 300 kilomètres du Mercantour au Mont Saint Michel. Belle leçon de volonté et de courage qui permet de dompter la souffrance et de l’asservir à la réalisation d’un objectif passionné, excitant.

-La mort suspendue de Joe Simpson qui part avec son ami Simon à la conquête du sommet terriblement dangereux à 6000 mètres d’altitude dans les Andes péruviennes. Au retour Joe tombe dans une crevasse et se fracasse la jambe. Il est suspendu à la corde de Simon qui le croit mort et pour éviter qu’il soit entraîné dans sa chute, coupe la corde. Terrible décision qui efface brutalement le plaisir de la conquête pour le remplacer par une culpabilité épouvantable.

Mais la puissance de la volonté, la capacité à endurer la souffrance, l’envie de vivre donne à Joe le courage d’affronter les éléments naturels diaboliques pour enfin rejoindre le camp de base. Et, c’est Joe par sa compréhension et l’acceptation des risques encourus, qui convainc Simon, au nom de leur amitié indéfectible, de conserver le beau souvenir de la conquête et d’abandonner sa culpabilité mortifère.

Ces expériences concentrées de bonheur liées à la réussite de l’objectif atteint lorsqu’elles sont entrelacées à des circonstances malheureuses forcent l’admiration et le respect.

Mais concernant la subjectivité du bonheur il n’est pas interdit de terminer en observant avec gourmandise le subtil rayon de soleil traversant le verre de bière pour l’éclairer de cette belle couleur ambrée, délicieusement rafraichie, posée délicatement sur la table en blanc d’ébène sur laquelle repose une belle carafe d’eau à la blancheur grisâtre.

Christian

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Bonheur, instant exquis

Le Bonheur ? un instant blanc ébène, un point d’orgue dans une symphonie de sensations diverses. Il peut être d’une douce cruauté si on le pressent passager, fugace, prêt à s’envoler, ou d’une terrible douceur, tant il est fragile, glissant entre nos mains tendues qui essaient de le retenir avant de le voir s’évaporer.

Le Bonheur est un gentil méchant. Souriant, il nous permet d’approcher le nirvana, pour mieux, avec un mauvais rictus, nous en priver, nous laissant souffrance et chagrin.

Il arrive avec son cortège de joie, de couleur, de musique, de beauté et de volupté, puis s’évanouit, agacé par notre stupidité à vouloir le croire éternel, nous laissant désemparés, démunis, errer dans un silence assourdissant, comme des morts vivants avec l’espoir de son prochain retour.

 

 

Gill

 

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