La désinvolture: son contraire

 

le désinvolte va maintenant nous décrire son contraire,

                                         le rigoureux, le tatillon

                                                      (25mn)

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Dans la fratrie nous sommes assez libres, tolérants et désinvoltes dans l’ensemble, sauf une de nous,  la deuxième de la couvée. Qu'est-ce qu'elle m'agace et souvent me tape sur les nerfs sans le savoir, une  vraie casse pieds avec son caractère rigide, voulant tout imposer à son entourage, faire toujours à son goût jusqu'à oublier que nous avons aussi un avis et qu'il peut valoir le sien;  par exemple une recette : impossible de changer les ingrédients cités , suivre exactement ce qui est demandé, s'il manque une chose on ne peut rien mettre d'autre sans s'attirer les foudres de sa colère qui peut être violente; il m'est arrivé d'essuyer une de ses colère,  ayant  par malice passé  outre sa décision et qu'elle s'en aperçoive trop tard, cela m'a fait passer l'envie de recommencer, croyez-moi ; dans une discussion, pour un choix de lieu, fêter un évènement, elle ne laisse rien passer, toujours mettre son grain de sel, prouvant qu’elle a raison ; et on doit accepter qu’elle ait le dernier mot, prenant sur nous même si cela crée des tensions et des protestations en essayant de la faire changer d'avis, lui suggérer d'écouter les autres qui ont des idées aussi valables,  qu'elle doit assouplir son point de vue, accepter d'autres choix que le sien , mais non , elle finit toujours par l'emporter, amener tout son petit monde à se rallier à ses  idées qui, dit-elle, sont les meilleures ; cela me fait bouillir intérieurement et bien souvent j'ai des envies folles de lui jeter ma colère à la figure en lui disant que c'est insupportable à la fin, mais je n'en fais rien, je préfère lui laisser croire que ça me plait qu'elle prenne les choses en main. Le rôle de chef  responsable, ça lui va si bien, et finalement jusqu'à présent, ses choix judicieux ont toujours été censés et obtenus un grand succès, alors réjouissons-nous d'avoir cette décideuse rigoureuse qui permet d'alléger le quotidien de toute la famille parce qu’elle l'aime cette famille et lui montre à sa façon. 

 

                       Rina   

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MON TATILLON DE CHEF

 

Mon chef ? Un bâton d’maréchal !

Un type sur tout à cheval !

Un vrai carnaval !

Son premier regard

Te donne des cauchemars.

Tu en oublies son semblant d’élégance.

Si tu ignores de quel côté il balance

Tu ne vas pas tarder à le savoir…

Si tu es en retard,

Aucune excuse

Ni alibi ne l’abuse,

Tu es faîte comme un rat,

Tu passes de vie à trépas.

Même pas,

C’est le purgatoire

Qui t’attend.

Pas de sens giratoire,

Direct, il te pourfend.

Tes calculs ne sont pas justes ?

Qu’importe pour toi,

Pas pour lui. Il t’assomme.

C’est ringard ?

Tu te retrouves au placard.

Guindé comme un majordome,

Il t’envoie vers le mitard.

Ton jean moulant dévoile un brin de fesse,

Il reste froid. Pas de caresse

Mais un aboiement tonitruant :

« Allez-donc à la confesse ! »

Le soir, quand tu passes la porte

Dans la cohorte,

Il te rattrape par un pan :

« Votre travail vous attend ! »

Et ton seul échappatoire,

C’est notoire,

Est ta démission sur le champ.                             Mouty

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J’ai toujours beaucoup aimé mon beau-frère, Sylvain. Quand il a épousé ma sœur, la moins fofolle de toute la famille, j’étais encore un jeune garçon et le calme qu’il dégageait, l’autorité naturelle qui émanait de lui me ravissait en me donnant une impression de sécurité. Il pensait toujours aux conséquences de ses actes et j’admirais son grand sens des responsabilités.

 

Plusieurs années après, ayant atteint depuis longtemps l’âge adulte, toutes ces qualités m’agacent car son caractère, au lieu de s’assouplir, est devenu de plus en plus rigide, voire intolérant.

 

Derrière lui en voiture, vous piafferez d’impatience, obligé de suivre son 45 à l’heure plutôt que son 50 un quart. A table, c’est tout juste si ses enfants auront le droit de parler car on laisse les adultes discuter sans les interrompre. Lors des repas de fêtes, interminables, pas question pour eux de quitter la table alors que nous-mêmes avons du mal à résister. A 20 heures, tout le monde dans sa chambre, extinction des feux sans aucune dérogation possible, et interdiction de télévision en semaine. Quant aux tenues vestimentaires de la famille, je n’en parle même pas : sobres à son avis, austères et vieillottes au mien ; aucune fioriture nulle part, de l’élégant, du convenable.

 

Certes, on peut dire que sa famille est un modèle d’obéissance et de politesse, que sa maison où rien ne dépasse est prête à recevoir des visites  à toute heure, qu’il est un conducteur responsable, bref, qu’il est tout le contraire du désinvolte. Mais où est le petit brin de fantaisie qui fait aimer la vie ?

 

       Gill

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             Un joli après-midi de printemps, dans une station balnéaire du littoral languedocien. Deux jeunes femmes, attablées à la terrasse d’un café, face à la mer sirotent à petites gorgées leurs thés citron brûlants. Elles sont à l’évidence en grande discussion. C’est très vilain, je sais, mais je ne peux m’empêcher de tendre une oreille indiscrète.

« - Alors manine, tu as fini par fixer une date, pour le mariage ?

- Bof ! Romu me tanne à longueur de temps mais moi je ne suis pas décidée ; je réfléchis…

- Ah bon ? Pourtant vous semblez bien vous entendre, tous les deux ! Et surtout, il est aux petits soins pour toi, Romuald, tu ne peux pas dire le contraire !

- Trop !! Et à sa manière ; ça m’énerve, tu ne peux pas savoir ! Tiens par exemple, avant que je sorte, il me pose toujours un gilet sur les épaules « Il va faire frais Minou, tu n’es pas prudente ! » ou bien il arrange ma coiffure « Aïe ! Aïe ! Aïe ! Ces cheveux toujours dans les yeux ! ». Et je ne te raconte pas dans la journée !

-  Si si, raconte

- Les choses doivent rester à leur place, principe numéro un, et moi, tu me connais, je suis un peu

- Bordélique

- Désordonnée. Et bien faut le voir courir derrière moi pour ranger les chaussures dont je viens de me débarrasser sur la moquette du salon en entrant. Ou remettre dans leurs pochettes les CD et les DVD juste avant d’aller au lit le soir. Comme si ça ne pouvait pas attendre le lendemain…

- Ah oui pôvre, ça ne doit pas être rigolo tous les jours ! Et au lit justement, comment il est ?

- Régulier peuchère, je ne peux mieux te dire. Tous les mardis et samedis soirs que le Bon Dieu fait… et pas une once de fantaisie, en plus. On dirait qu’il suit une procédure, tu vois le genre…

- Oh la !! Et toi si… !

- Comme tu dis. Alors tu comprends, j’ai plutôt envie de changer d’air, ces temps-ci, d’autant que le beau Serge me tourne autour depuis un moment…

- Le joueur de rugby ?

- Lui-même. Ah ! Ce serait autre chose la vie avec lui !

- Pour sûr ! Mais tu ne crains pas qu’il soit un peu…volage, comparé à Romuald, lui si sérieux, si fidèle !

- Tant pis. Je n’en peux plus. Tiens, je ne t’ai pas encore dis la meilleure ! Tu ne sais pas quoi ? Il passe une lingette désinfectante sur la lunette chaque fois que l’on utilise les WC ! Qu’est-ce que tu dis de ça ?

- J’en reste sans voix. C’est un vrai maniaque, ce type !

- N’est-ce-pas ? Alors tu comprends, le mariage… »

      Sur ce, les deux jeunes personnes se lèvent et se dirige d’une démarche balancée et nonchalante vers la plage. Deux brunettes, bien du Midi.

          Quant à moi, je me demande la tête que va faire le fameux Romu avec ce qui ne va pas tarder à lui pendre au front. Mais il est vrai que dans une région fervente de tauromachie…

 

                      El Pé

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