Les enfants ou la boulangère?

 

Chacun écrit une courte phrase sur deux papiers différents que nous plions pour faire un pot commun.

 

Nous tirons au sort deux papiers et lisons les deux phrases qui y sont écrites

« Bonjour madame, je voudrais deux baguettes pas trop cuites s’il vous plaît »

« les enfants jouaient heureux sur l’herbe verte »

 

                                      Nous allons écrire un texte commençant par l’une d’elles                   

                                                   et se terminant par l’autre, au choix.

 

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"Bonjour madame, je voudrais deux baguettes pas trop cuites"

  Quand elle est entrée dans la boulangerie de campagne et qu'elle m'a fait cette demande,  je me suis douté qu'elle n'aimait pas le bon pain. (Pas trop cuite la baguette? Et pourquoi pas crue la pâte?)

–"Mais pourquoi voulez-vous du pain mal cuit ?

–Mais c'est à cause des enfants et de leurs dents!

–De leurs dents ? A l'époque , faute d'hygiène ou  à cause des sucettes trempées dans du miel qui brulait les bourgeons dentaires, ils perdaient les dents avant qu'elles ne poussent, mais maintenant ?

–Maintenant? Ils ne savent plus mastiquer. A force d'ingurgiter des produits manufacturés, des bouillies, des purées, des pizzas aux pâtes molles, des tartines de pain de mie sans croûte avec leurs kilos de   pâte indigeste, ils ne savent plus croquer.

Les pommes? ils les mangent en marmelade. Plus de bon beef        trop difficile à mâcher; on mange des steaks hachés. Et ne leur parlez pas des œufs durs, ils ne comprendraient pas.

–Et qu'allez-vous leur cuisiner avec votre baguette pour édentés?

–Je vais leur faire un sandwich avec un fromage à pâte molle.

–Êtes-vous certaine qu’ils apprécieront ?

–Venez voir dès que j'aurai terminé.

      Un bon moment après, je suis sorti pour  voir comment se passait le repas.

Ils avaient terminé leurs agapes et l'estomac bien rempli, les enfants jouaient sur l'herbe verte.

Jean-Pierre

 

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Poisson de Mars

        «  Les enfants jouaient, heureux, sur l’herbe verte ».  Ils ne se doutaient pas de ce qui allait arriver à la minute suivante, les pauvres !

Il y eut en effet un bruit étrange, comme s’il allait neiger des anges et tout le monde levaient les yeux vers les nuages, dans un mélange d’inquiétude et d’amusement*… Et puis soudain, déchirant le ciel, apparut l’engin.

Moment de panique dans le parc de la ville et les rues alentour :

« -Ciel, qu’est-ce donc que cela ? Une bombe ? Est-ce Hiroshima mon amour ?

-Non mon amour. Courage. Garde ton sang froid ! D’ailleurs, si c’était une bombe, elle aurait déjà explosé. Vue la vitesse réduite, c’est plutôt une fusée …enfin je crois.

-Un vaisseau spatial, rectifia aussitôt un monsieur à lunettes, vous pouvez me croire, je m’y connais. »

Ce monsieur avait raison. Le vaisseau (car c’en était un, effectivement), atterrit sur la pelouse du parc en douceur. Un bon moment s’écoula, dans un silence oppressant, puis une ouverture apparut dans la paroi, comme par magie.

   Aussitôt, dix, vingt, bref une cinquantaine de petits êtres très, très bizarres surgirent et se mirent à voleter gracieusement jusqu’au sol. La même pensée traversa l’esprit de tous les spectateurs terrorisés : « Des Martiens !!! ».  Nous aurions fait comme eux. En effet, les drôles de créatures possédaient six pieds, a priori nus, et un bouquet de tentacules accroché à chacune de leurs trois oreilles. Tout dans leur apparence se révélait particulièrement effrayant, à commencer par l’expression de leur regard, émanant de leur unique et gros œil bourgeonnant au dessus d’un fil vert serpentant entre les oreilles et qui devait certainement leur servir de bouche…et en la circonstance de sourire sardonique. Sans parler de l’espèce de tube métallique glissé entre leurs tentacules « Un désintégrateur !!! » souffla le monsieur à lunettes avant de recevoir très violemment dans les côtes le coude de son voisin de droite.

   L’un des « Martiens » se détacha alors de ce qui ressemblait de plus en plus à une section d’assaut  et se dirigea en tournoyant  sur ses six pieds vers la boulangerie située juste en face de la grille principale du parc. Il entra et là,  avec un fort accent des faubourgs de Narbonne et d’un ton amène  il interpela la patronne : « Bonjour Madame ! Je voudrais deux baguettes pas trop cuites s’il vous plait ! ».

El Pé

* Je suis sûre que tu ne m’en veux pas, oh, Claudio !!

 

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LE PROJET

 

« Bonjour Madame , je voudrais deux baguettes pas trop cuites, s’il vous plaît »

 

« Voilà Madame, à bientôt »

«  Au revoir Madame »

La femme sortit de la boulangerie avec ses deux baguettes sous le bras et rentra rapidement chez elle. Elle avait fort à faire aujourd’hui. C’était le jour de cantine des enfants, tant mieux elle aurait plus de temps pour mettre son plan à exécution…

Sa vie était devenue un enfer. Celui qu’elle avait épousé il y avait maintenant plus de dix ans, était devenu violent, irascible et méchant avec les enfants.

Il avait changé plusieurs fois d’emplois, s’était fâché avec ses collègues, avait injurié ses directeurs. Bref il filait un fort mauvais coton. Elle ne savait plus quoi faire pour échapper aux coups et aux propos insultants. Il rentrerait pour déjeuner tout à l’heure, il l’avait prévenue.Vite, vite il lui restait peu de temps.

Il adorait les sandwichs de rillettes avec des cornichons. Elle lui confectionna un énorme sandwich avec une des baguettes fraîches, trempa les cornichons dans le pot de Mort aux Rats et les enfonça profondément dans une épaisse couche de rillettes. On verrait bien …

L’homme rentra en chancelant, il s’était arrêté au bistro du coin !

Il s’affala sur une chaise , cria qu’il voulait manger tout de suite, décocha un coup de pied vicieux dans les tibias de sa femme qui lui apportait le sandwich, engouffra ce dernier en un tout de main et s’effondra le nez dans l’assiette en émettant un rot sonore.

Elle le prit à bras le corps et le traîna tant bien que mal jusqu’à la chambre.

Elle le hissa sur le lit, retira ses chaussures et le laissa là.

Elle continua à vaquer à ses occupations.

N’entendant rien dans la chambre, elle entra et constata qu’il ne respirait plus.

Elle poussa un soupir de soulagement, alla dans la cuisine se préparer un café, et vit par la fenêtre ses enfants qui jouaient heureux sur l’herbe verte !!!

 

CHRIS

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