Deux plumes pour une lettre et sa réponse

 

Écrivez sur un papier le nom d’un personnage et le nom d’un objet pour faire une pioche. Tirez au sort un papier.

 

En 25 minutes écrivez une lettre à qui vous voulez en vous mettant à la place du personnage tiré au sort, et comportant le nom de l’objet. Mélangez-les.

Tirez une lettre au sort et en 25 minutes rédigez la réponse.

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Chers tous, lettre universelle,

 

Depuis des années, je punis tous les enfants qui n’ont pas été sages ; ces enfants qui ont tiré la langue, chapardé des bonbons, cassé leur vélo, qui n’ont pas appris leurs leçons. Et je me rappelle plus particulièrement celui qui a mis une louche en équilibre au-dessus de la porte pour faire peur à sa grand-mère. Mon fouet a bien travaillé : un petit coup sur les fesses de celui-ci, une tape sur les mains de celle-là. J’ai surveillé pendant des années toutes les polissonneries des uns et des autres, étant plus clément pour ceux qui avaient des regrets, plus sévère pour ceux qui étaient fiers.

 

Aujourd’hui, je vous annonce que je prends ma retraite, et j’en suis bien content :

Vous pouvez aller faire fouetter vos gosses ailleurs…

 

Meilleures salutations.

 

Le Père Fouettard                                      Claudie

 

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Cher Père Fouettard,

 

Enfin, une bonne action de ta part. Tu as compris qu’il valait mieux ne pas s’incruster sur la scène à l’instar de certains animateurs de la télé qu’on en a marre de supporter. Toi, on te supportait par la force des choses car tu faisais partie du paysage audiovisuel propre au Père Noël et à Saint-Nicolas. Tu nous collais un peu la trouille mais ça nous émoustillait, avides de savoir si notre sabot serait bien rempli malgré la flopée de bêtises et de petits larcins que nous avions commis.

 

Père Fouettard, Bonne Retraite ! Mais je crois que tu vas nous manquer tu sais, car derrière ton visage de massacreur nous devinions un peu de bonhommie et de mansuétude pour les pauvres gosses égarés de la morale que nous étions. Je me permets de te rappeler, mais cela tu le sais sûrement, que la retraite est le moment du bénévolat, et qu’en cas de défaillance de ton successeur tu seras, à l’occasion, le bienvenu, histoire de nous remémorer nos frousses anciennes et de les comparer avec les actuelles.

 

Allez, sans rancune Père Fouettard, et peut-être à bientôt.

 

Un pauvre gosse                              Mouty

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Chers élèves du Royaume de France

 

Bien installé dans mon fauteuil préféré, mes pantoufles favorites aux pieds, je voudrais vous souhaiter la bienvenue dans l’école de l’an 789, une école qui accueillera les fils bien nés autant que ceux de condition modeste. Vous allez tous pouvoir accéder à la connaissance. Plus d’ignorants, plus d’analphabètes. Vous deviendrez tous en mesure de lire un manuscrit, de signer un document, de faire les comptes de vos futurs commerces.

 

Vous apprendrez la lecture, l’écriture, le calcul, la religion, l’histoire de votre pays et la géographie du monde. La terre n’aura plus de secrets pour vous.

 

En échange, vous vous engagerez à respecter ceux qui vous enseigneront, ainsi que les classes qui vous accueilleront. Vous observerez la plus grande politesse vis-à-vis de vos maîtres et de vos camarades.

 

Certains d’entre vous, ayant le goût de l’étude, transmettrons peut-être à leur tour leur savoir ou deviendront de grands écrivains ou d’éminents mathématiciens.

 

Saisissez l’’opportunité qui vous est donnée d’acquérir la liberté par la connaissance.

Croyez-moi, mon école réinventée et développée ira loin !

 

Charlemagne  Roi de France                          Gill

 

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 Votre Majesté

 

Après avoir pris connaissance de votre missive, je tiens à me présenter. Je suis un écolier du vingt et unième siècle et c’est très gentil à vous de me souhaiter la bienvenue, mais vous savez, je vais à l’école à reculons. Je n’aime pas les mathématiques et pour écrire maintenant, il y a l’ordi qui corrige les fautes d’orthographe, alors pourquoi s’en faire.

 

Même si je fais un effort pour faire tout ce que vous dîtes, c’est pour avoir le dernier smartphone avec tous les jeux qui existent, que mes parents, trop contents de mes notes, vont m’offrir.

 

Alors, mon cher Roi de France, continue de caresser ta barbe fleurie dans tes pantoufles et ton fauteuil préféré.

 

Nicolas                                                         Dedou

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Mon cher Gérard,

 

Je t’ai cherché partout, au Paradis, évidement, impossible de te trouver. Où t’es-tu donc planqué ? Oui, oui, je suis d’abord allé trouver Molière, qui t’avait vu, m’a-t-il dit, il y a une dizaine d’années. Je te parle en temps terrestre, tu l’auras compris. Même qu’il m’a demandé de te passer le bonjour, quand je te verrai. Bref, tu n’y étais pas. Chez plusieurs réalisateurs de cinéma, ce fut la même chanson. Ouais, ils t’avaient rencontré, à un moment ou un autre, mais de Gérard au présent…macach bono.

 

Aussi, en désespoir de cause, je t’écris cette petite lettre, que je remettrai à l’Archange Gabriel, afin qu’il te la fasse parvenir. Avec lui, je suis tranquille, il a l’habitude des commissions délicates.

 

Tout ça, pour te dire, mon cher Gérard, que depuis que j’ai vu, sur grand écran céleste, le film dans lequel tu joues mon personnage, je suis devenu un de tes fans les plus accros. D’autant que tu apportes à mon personnage une dimension que je n’ai pas eue. Oui, quand il s’agit des nanas, n’en parlons pas, et même quand tu charges l’ennemi au son du clairon, tu restes classieux. Je l’avoue ce n’était pas mon cas.

 

Je t’invite, je t’attends jeudi prochain à 11 heures, à la cafet de Marie-Madeleine. J’ai hâte d’y être.

 

Bien à toi,

 

Fanfan                                        el Pé

 

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Mon cher Fanfan,

 

Ta lettre m’a beaucoup touché. Je me suis bien amusé à jouer ton personnage. J’ai essayé de lui donner le meilleur de moi-même dans la drôlerie, l’audace et la vivacité. Je te remercie d’avoir eu des aventures aussi pittoresques, tu étais à ta manière un personnage hors du commun, même si tu minimises tes talents.

 

Je ne suis pas étonné que tu m’aies cherché partout. Dans ma vie, même si elle ne fut pas très longue, j’ai côtoyé tant de personnages, d’auteurs, de réalisateurs de mon temps et de temps plus anciens. Mon âme les cherche à travers les nuées et l’Eden. Pour ceux que j’ai retrouvés, certaines rencontres furent mornes, d’autres joyeuses, d’autres suaves et langoureuses.

 

Aussi, pour un peu changer d’air, j’accepte ton invitation, je serai jeudi prochain à 11H à la cafet Marie-Madeleine.

 

Salutations,

 

Gérard Philipe                    Claudie

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Chère mémé, cher pépé,

 

Vous vous plaignez de mon silence….mais non, je ne suis pas un ingrat oublieux de mes devoirs familiaux. Mais le chameau qui emporte le courrier jusqu’au bateau à Port-Saïd ne se dépêche pas, il rêve à sa retraite dans une oasis, entouré et servi par un harem de jeunes et dociles chamelles. Que vous raconter ? Ma vie est monotone : les ouvriers creusent dans le sable jusqu’à ce qu’ils exhument un fragment plus ou moins gros de pierre couvert de signes mystérieux que j’ai baptisés hiéroglyphes. Contrôlez avec le dictionnaire l’orthographe de ce mot barbare. Un jour, j’ai cru qu’on avait déterré les tables de la loi – vous savez que Moïse les a perdues dans la traversée du désert. Déception, c’était une recette de cuisine qui commençait ainsi : « prenez une casserole, remplissez-là d’eau, faites-là bouillir au soleil. » Après je ne sais plus car je n’ai pas achevé le déchiffrage de l’alphabet ancien égyptien. Tout savant Champollion que je sois, je ne suis pas arrivé à lire l’écriture des pharaons en entier. A ma décharge, je dirai que le roseau affûté utilisé par les scribes trouait souvent les papyrus. D’où de grandes difficultés de compréhension qui retardent mon retour. Portez-vous bien et attendez-moi bien patiemment. Votre petit-fils qui vous embrasse sur les deux joues.

 

Champo.                                  Line

 

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Mon cher petit,

 

Ces nouvelles de toi sont les bienvenues car il est vrai que tu ne nous en donnes pas souvent. Je sais, Port-Saïd, c’est loin, mais il faudrait surtout penser à changer le vieux chameau qui emporte le courrier. De grâce, mettez-le à le retraite au milieu de ses chamelles, et prenez-en un jeune et bien fringant qui assurera le travail avec célérité et dynamisme.

 

Déterrer les tables de la loi, ce serait effectivement très satisfaisant pour toi, mais je vais te dire : Moïse n’avait qu’à y faire attention. C’est incroyable d’être aussi négligeant. Enfin ce problème n’est pas le plus grave, car moi, ce qui m’ennuie beaucoup, c’est que tu n’aies pas réussi à déchiffrer la fin de cette recette de cuisine. Tu sais comme pépé aime la cuisine exotique. Cela l’aurait changé de l’éternel gratin de pommes de terre.

 

Aussi mon petit, tu vas me faire le plaisir de te mettre rapidement à la tâche pour me déchiffrer cette écriture récalcitrante. Débrouille-toi, révise-moi ton alphabet ancien égyptien, renseigne-toi auprès de tes savants confrères sur l’écriture des pharaons et ne reviens qu’avec cette recette complète. Nous pourrons peut-être alors te pardonner tes trop rares missives.

Travaille bien, mon petit Champo. Nous t’attendons impatiemment, la batterie de cuisine au garde à vous.

 

Mémé et pépé qui t’aiment               Gill

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               Bien chère Joséphine,

     Me voici, encore une fois, loin de toi, de ta douceur, de ton amour, sur les sentiers de la guerre.

 

     Ce sacre d’empereur, pour lequel j’ai tant bataillé, m’aura mené sur tous les fronts, tant à l’Est qu’à l’Ouest.

     Certes, mes victoires m’ont apporté gloire,, célébrité et puissance. Mes défaites, elles, furent terribles.

     Ma volonté de conquêtes aura couté la vie de milliers d’hommes, courageusement morts au combat. La vision de ces charniers, après chaque bataille, les cris déchirants des survivants m’interrogent parfois sur la légitimité de ces guerres incessantes.

 

   Alors, ma douce, je pense à toi, à ta peau si douce, grâce à la louche de lait d’ânesse que tu mets chaque fois dans ton bain, à tes bras, à ta bouche…

 

     A bientôt donc, je t’aime.

                                                                                              Napoléon                     Valérie

 

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        Décidemment, tu ne changes pas, mon Napo adoré. Toute une littérature pour parler de tes batailles, de tes victoires et de tes états d’âme… en fait de toi-même, mon grand chéri à l’ego surdimensionné…pour terminer par une charge à la hussarde-bien sûr on ne se refait pas- en trois lignes. Grâce auxquelles, n’est-ce-pas, je dois me sentir délicieusement femme. Une femme parfumée au lait d’ânesse certes, mais avant tout aimée, comblée, en un mot : HEUREUSE.

 

       Mais je commence à en avoir l’habitude, mon biquet, aussi en ai-je pris mon parti.

Tu seras content de savoir que ta Joséphine est devenue sage, pour ne pas dire philosophe. Ecoute un peu :

 

     Je m’éclate comme pas permis à la Malmaison et je ne te remercierai jamais assez de m’avoir offert cette somptueuse demeure. Elle adoucit, un peu, la tristesse due à ton absence. Car tu me manques terriblement, mon chéri, aussi j’essaie de l’oublier en dépensant ton argent comme une petite folle, en toilettes, bijoux, banquets et tout ce qui s’en suit.

 

     Mais, comme tu me manques toujours malgré tout, j’ai fait en sorte de m’entourer de beaux jeunes gens, portant bien l’uniforme et gentiment planqués à l’abri de la guerre grâce à leurs relations.

 

       Cela dit, amore mio comme l’on dit dans ta famille, je ne m’endors jamais sans penser à toi. Sans m’imaginer que tu es près de moi, là, dans notre lit et que j’embrasse passionnément ton beau torse dénudé… Mais j’arrête car poursuivre dans cette voie...risque de te faire plus de mal que de bien.

 

 

           Toute à toi,

Ta Jojo qui te kiffe* très fort.

 

*J’ai appris ce mot d’un de tes capitaines au retour de ta campagne d’Egypte.

                                                                                                      

     JO                                                  El Pé