Les dix mots de la parole

 

L'édition 2018 de la Semaine de la Langue Française invite chacun à s'interroger sur les usages de la parole

"Dis-moi dix mots sur tous les tons" nous propose 

accent / bagou / griot ou griotte

jactance / ohé / placoter / voix

susurrer / truculent : volubile

pour nous y associer, nous allons écrire un texte en utilisant le maximum de mots proposés.

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« Ohé bonnes gens ! Approchez, approchez ! Venez entendre la Voix de la Vérité, la Parole sans accent du Midi ou d’ailleurs ! Non pas celle d’un bigot qui va vous susurrer des sermons sans queue ni tête et placoter des heures durant à propos du Bien et du Mal, si bien que vous ne saurez plus où vous en êtes, ni même qui vous êtes !  NON !

    Pas davantage celle d’un professionnel de la jactance, au bagou intarissable, volubile à l’excès, truculent pour vous prendre dans ses filets et qui va si bien vous entortiller qu’à la fin vous serez prêts, si ça se trouve, à signer un engagement de cinq ans dans le Légion Etrangère ! NON !

     Venez au contraire entendre la parole d’un philosophe, d’un mystique éclairé, d’un homme tout simplement. OUI ! Un homme qui saura vous conduire sur les chemins de la lumière à défaut de la gloire et…N… de D…, je ne me souviens plus de ce que je voulais vous dire, mais ne vous inquiétez pas, ça va me revenir… »

       Ainsi parla Zarathoustra, peu après avoir fêté en joyeuse compagnie son anniversaire, la veille en fait de son fameux discours mis en musique par son pote Richard Strauss. Ce discours-ci est nettement moins connu, bien sûr. Allez, à la bonne vôtre !

                                                  

  El Pé

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Ils avaient du bagou les poètes de mon temps ! Léo Ferré,  le griot  des anarchistes, George  Brassens , le roi de la jactance,  Jean Ferrat qui susurrait des "je t'aime à sa môme," Félix Leclerc, le bûcheron dont les souliers avaient tant voyagé, avec cette voix grave et ce petit accent délicieux , et puis aussi Barbara et ses truculentes interrogations: « quand reviendras-tu » ? « Pour qui, comment, quand et pourquoi » ? ou encore Hugues Auffray sur son fameux trois mats ohé ohé ! et puis bien sur Jacques Brel, placotant avec Léo et George pour un concours de volubilité dans toutes les facettes de la belle langue française.

 

Louis

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RUE STE CATHERINE

 

Il faisait très froid, la nuit s’était solidement installée, il n’était pourtant que 16 heures.

Le vent soufflait violemment, les rues étaient désertes ou presque, quelques rares silhouettes courbées se frayaient un chemin au travers de la neige tourbillonnante.

Elle était frigorifiée, désorientée et se demandait  encore pourquoi elle avait voulu s’installer à Montréal ! Quel climat !

Elle avait rendez-vous à Ste Catherine pour placoter avec une amie montréalaise pur-jus ! Placoter … ce mot lui avait tout de suite plu !! L’accent québécois l’enchantait.

Elle avait du bagou, elle était volubile alors découvrir cette nouvelle façon de parler français lui plaisait beaucoup.

La rue Ste Catherine ne devait plus être très loin, du moins elle espérait !

Tout à coup, sorti d’une ruelle comme un diable hors de sa boîte, un personnage truculent apparut à ses côtés.

Il lui susurra quelque chose à l’oreille  avec une voix grave et effrayante.

Que lui voulait-il ? Elle ne comprenait pas un traître mot de ce qu’il disait, ses paroles s’envolaient avec le vent.

Elle essaya de courir mais ses chaussures glissaient sur le sol gelé.

L’individu continuait sa jactance en gesticulant et agrippait son épaule avec force. Elle avançait entraînant le personnage dans son sillage, son cœur battait la chamade.

Rue Ste Catherine, rue Ste Catherine !!! Ohé !! Où es-tu ?

Sauvée !!! Des lumières, des gens, un peu d’agitation …

Tel un vampire chassé par la lumière vive, l’individu disparut comme il était apparu !

Rue Ste Catherine, Le café, son amie qui l’attend !!!

 

Christine

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Ohé, vous tous, écoutez-moi !

 

A mon avis, il y a une infinité d’accents dans le monde. Certains sont harmonieux, comme j’imagine celui des griots qui détiennent le pouvoir de la parole, qui transmettent les légendes et les mythes. Certains sont plus durs à l’oreille avec des sonorités gutturales, et certains sont si chantants qu’ils inspirent la gaîté et font naître le sourire. Ecoutez l’accent provençal, celui de Marcel, et vous verrez des personnages truculents placoter malicieusement avec un bagou inimaginable. Ils sont volubiles et prompts à s’enflammer, leur jactance est sans égale et vous ne les entendrez jamais susurrer d’une voix douce, mais clamer haut et fort leurs opinions.

 

Cet accent-là, moi, je l’aime !

 

Gill

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