L'attente

 

Chacun écrit l’objet d’une attente sur un petit papier. Il peut s’agir d'un évènement exceptionnel ou quotidien; heureux ou stressantUn papier est tiré au sort dont le thème est

 

Attente d’un résultat

 

En 20 minutes, écrire sur le thème désigné, soit en succession de phrases très courtes, soit en une ou deux phrases très longues.

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      Attention…10H00 pile.  Top ! C’est parti. Combien ils m’ont dit déjà ? Trois minutes ? Je vais quand même vérifier sur la notice. Oui, c’est ça, trois minutes. C’est long ! Dieu que c’est long, trois minutes d’attente ! Et bien sûr, Jérôme qui n’est pas là. Normal. Il n’est jamais là quand il faut. Je me demande même pourquoi je l’ai épousé, ce mec ! Oh ! Doucement cocotte, c’est du père de ton enfant que tu es en train de parler là ! Du père de  ton FILS ! Pourquoi un fils d’ailleurs ? Parce que cela ferait tellement plaisir à Jérôme pardi ! Normal.  La descendance quoi, comme dans les Visiteurs. Ah je te jure ces aristos ! Enfin, aristos  c’est vite dit. Vu que le grand-père, il a bel et bien acheté sa particule, le bouffon. Sûr comme deux et deux font quatre que mon Jéjé va vouloir choisir le prénom. Un truc du genre Gaétan ou Charles Bertrand. Pauvre môme ! Et ce n’est pas fini. Il va t’envoyer en pension en Angleterre, dès tes dix ans mon petit loup ! Belles bagarres en perspective ! Non, décidemment, ce sera une fille, et si ton Papa n’est pas content, on s’en tape ma chérie. D’ailleurs il sera complètement gâteux de toi avant la fin du premier mois, ma jolie poupée. Oh mais attention ! Pas une poupée style Comtesse de Ségur née Rostopchine. Pas question. Car j’en ferai une battante, moi, de MA fille. Nourrie à la sauce karaté et Beauvoir. Et belle aussi. Comme j’aurais voulu l’être. Dans mes rêves. Et si c’était des jumeaux finalement ? Après tout pourquoi pas ? Parait qu’il y en a eu dans ma famille. Autrefois. Ce serait méga chouette. Et toutes mes copines vertes de jalousie. A propos de couleur, quelle heure est-il ? Ouah ! Dix heurs quatre ! Allez, on y va. On respire à fond et on regarde le résultat…

 

…Merde, encore raté.

 

               El Pé

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Comment ai-je pu être aussi bête, je savais tout, tout par cœur. Je sais que j’ai raté, j’ai bégayé, j’ai eu un trou. Ah ! Si je pouvais remonter le temps, deux heures plus tôt, trois heures. Ce matin, Maman m’a couvée. Elle m’a tellement épaulée, m’écoutant ânonné ce rôle pendant des heures, m’aidant à choisir les bons vêtements.

 

En partant, elle m’a dit « Pauline, les cinq lettres ». Je n’ai pas répondu « Merci ». C’était la seule à croire en moi. Maintenant, je me rends compte qu’ils avaient tous raison, croire que je pourrais devenir comédienne, quelle connerie. Et ce prof qui n’arrêtait pas de répéter : « Oh ! Elle joue si juste ». Je voudrais le voir aujourd’hui : « gna, gna gna ; elle joue si juste ».

 

Je suis là sur ce banc, à attendre que l’autre arrive et dise : « Mademoiselle Machin, vous êtes prises, les autres vous pouvez aller vous recycler ». En plus elles rigolent ces dindes « Moi, j’ai déjà eu un rôle avec Huster », « moi, avec Luchini ». Et moi, là, je n’ai jamais rien fait, je n’aurai jamais rien. J’ai été nulle, archinulle. Quelle déception pour moi, pour Maman et quelle rigolade pour les autres. Après tous ces efforts, j’aurais aimé avoir un peu de réussite, aller un peu plus loin où on ne m’attendait pas. Leur clouer le bec à tous ceux qui m’ont toujours vu comme une sotte empotée.

 

« Pauline Ester…. PAULINE ESTER »

 

Mais, c’est moi, et me voilà en larmes, qu’est ce que tu es gourde. Maintenant, je vais attendre les répétitions, la première, le public et…le trac.

 

Claudie

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J’attends

 

Les résultats du Bac ne sont pas encore affichés ! Mais que foutent ces secrétaires bon sang de bon soir, elles sont coincées dans la photocopieuse ou dans la machine à café, elles ne se rendent pas compte, les bougresses, de l’impatience des candidats, des fourmillements dans les jambes, du mal au dos de plus en plus violent, du mal au crâne incommodant, du mal aux dents lancinant, de l’envie d’uriner qui prend à la gorge. Rien au fond du couloir, marre d’attendre, et des retardataires qui viennent s’agglutiner, m’enserrent comme une sardine à l’huile, individus hétéroclites dégageant des odeurs de transpiration, d’après-rasage, de brillantine, d’haleines aux effluves de tabac ou d’ail, et j’en passe. Des rangers écrasent mes orteils, où se croient-ils ceux-là, dans un défilé de mode, une manif, une boîte à cinq balles ? Marre, marre et encore marre, je vacille mais ne risque pas de m’effondrer vu les étais qui me soutiennent, mon estomac se soulève, ma main ne peut accéder aux pastilles Vichy qui trainent au fond de ma poche, quelle galère cette attente, habituel emmerdement de fin d’année, l’épreuve d’après Bac c’est celle-là, elle m’épuise plus que toutes les autres, j’en ai ma claque. Une porte s’ouvre au fond du couloir, la porteuse de paperasse met une éternité pour accéder au tableau d’affichage, la liste est interminable, y suis-je ? Pas moyen de bouger, une poussée intempestive m’écrase, je ne peux avancer ni reculer, allez, comme tout les monde je vais jouer des coudes, des genoux, des godasses, des épaules, et je vais y arriver, pour découvrir quoi bon dieu, j’en tremble, je suis lessivée, cela vaut-il le coup d’attendre alors que les jeux sont faits ?

 

Mouty

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Le tirage au sort

 

Nous sommes dix étudiants à passer l’oral. Comme on nous l’a proposé, j’ai demandé à passer la première. J’agis toujours ainsi quand c’est possible, je me jette à l’eau !

 

J’ai tiré au sort une question et maintenant il ne me reste que quelques secondes pour en connaître le résultat. Et en ces quelques secondes qui me séparent de la lecture de la question, mille pensées angoissantes envahissent mon cerveau. Ma blouse est-elle d’une blancheur impeccable, mes oncles bien courts, mes mains nettes, sans bijou ? Serai-je inspirée par la question ou aurai-je un trou noir ? J’ai tout révisé, pas d’impasse. J’ai beaucoup travaillé, toute l’année ; pas de sorties, peu de poses, soirées studieuses, levers à l’aube, nuits courtes, une vie quasiment monacale, si l’on peut dire. J’ai suivi mes stages pratiques avec beaucoup d’assiduité et de sérieux. Mais maintenant, j’ai l’impression que tout se mélange dans ma tête.  

 

Allons-y, je respire à fond, ouvre mon papier sans trembler, je n’ai plus peur. Je prends connaissance du sujet à traiter. Incroyable ! Je viens de revoir ce point dans le métro, en venant. L’angoisse est terminée, tout se met en place dans ma tête, je commence à parler d’une voix claire, mes gestes sont assurés, tout va bien.

 

Gill  

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