Le mot à mot des sports d'hiver

 

Chacun cherche deux mots, nom commun ou verbe, en rapport avec les sports d’hiver pour faire un pot commun.

On tire un mot au sort puis chacun commence à écrire un texte en y introduisant ce mot.

Toutes les cinq minutes, un mot est tiré. Il doit être introduit au fur et à mesure du tirage au sort dans le texte.

Chacun termine son texte après le quatrième mot.

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Théorie de Freud

wikimédia

 

            I stepped into an avalanche*

     « Remontez dans le temps, intima le psy chevelu à sa patiente sous légère hypnose, vous rajeunissez… rajeunissez… vous en êtes à présent au début de votre adolescence… et un souvenir remonte à la surface…

-Oh oui ! s’écria Ermeline, dont l’état ralentissait notablement l’élocution, oh oui, ça y est,  je me souviens ! J’ai treize ans, et pour la première fois, mes parents m’ont laissée partir en classe de neige, quel bonheur ! Mais dès le lendemain de mon arrivée, je suis tombée du tire-fesses et…

-Et cela vous a beaucoup traumatisée, évidemment.

-Oh oui Docteur, d’autant que dans ma chute j’avais perdu mon doudou, dont je ne me séparais jamais !

-Votre doudoune ? Vous vous étiez donc dévêtue entre temps ? Intéressant !!

-Mais non ! Mon « Doudou », je vous dis. Et j’imaginais déjà les sarcasmes de mon père, lui qui n’a jamais cessé de me prendre pour la reine des gourdes…

-C’est cela oui. La perte de doudou a sans nul doute constitué une fracture signifiante dans votre subconscient. En fait, n’est-ce-pas, il y a eu un avant et un après…

-Pas du tout ! Parce qu’en escaladant la paroi du trou (que mon corps en tombant avait creusé, oui j’étais un peu boulotte à cet âge-là) , en l’escaladant donc j’ai retrouvé Chouchou !

-Chouchou, bien sûr votre…

-Oui !!! Mon doudou chéri ! Oh ! Quel soulagement ! Quelle joie ! Mais…il y a eu d’autres choses aussi, ça me revient…

-Ah ? Je vous écoute.

-J’ai failli m’étouffer, à la cantine, avec un morceau de poulet avalé de travers ; et puis, je me suis perdue un soir en allant aux cabinets ; et puis aussi, Marion, cette chipie, m’a accusée devant la mono de lui avoir volé cinq francs et j’ai dû les lui rembourser, alors que ce n’était même pas vrai ! Oh Docteur, quelle honte !

- Je vois oui. Evidemment, tout cela n’était pas fait pour vous remonter dans l’estime de votre père et par conséquent dans la vôtre. Chère Madame, ne cherchez plus, toutes vos angoisses, tous vos blocages, si invalidants, proviennent de là, et ensemble, nous allons pouvoir désormais travailler à reconstruire une personnalité plus…

-  Attendez…attendez …je me rappelle…non Docteur, vous n-y- êtes pas du tout ! Oh mon Dieu quelle horreur ! Comment-ai-je pu oublier cela !

-Cela quoi ?

-Mais la catastrophe du téléphérique voyons ! Dont j’ai été la seule survivante, et ça Docteur, je le découvre maintenant, ça, mon père ne me l’a jamais pardonné ! »

 

 El Pé

* de Léonard Cohen. Merveilleuse chanson très engagée sur les chemins de l’angoisse.

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Base del Cerro Catedral en Bariloche. (Patagonia Argentina) 01

wikimédia

 

Sports d’hiver !!!

 

Equipée de pied en cap, me voilà devant la piste pour débutants ! Ouïe, ouïe, ouïe !!! Qu’est ce qu’il m’a pris de me laisser embarquer dans une histoire pareille ??? Je n’ai jamais fait de ski et à mon âge ce n’est pas évident de s’y mettre !!!

Bien, le tire-fesse  est là ! …  Que faire ? On me fait signe de me dépêcher ! Tant bien que mal, avec ces grandes planches aux pieds ce n’est pas très commode, je réussis à attraper la perche, j’essaie de poser mon auguste postérieur sur la barre mais patatras, ma doudoune se prend dans je ne sais quoi et me voilà parterre, toujours agrippée à la perche, je suis traînée jusqu’en haut de la petite piste. Ce n’est vraiment pas glorieux !  J’essaie de me relever, après plusieurs essais j’y arrive enfin ! La neige est fraîche, Je suis trempée ! Courage, maintenant il faut redescendre si possible sur ces 2 appendices bleu et blanc fixés sur mes chaussures !!! Comme ce serait plus simple avec seulement les chaussures !!!Bon tant pis, tant qu’il n’y a pas de mauvaise chute et de fracture, il faut y aller. Vacillante, je dirais même chancelante, me voilà partie, grotesque lutin, sur la pente douce pour débutants.  Les petits, les tout-petits me dépassent en slalomant avec aisance SANS bâton !!!  Tout doucement, tout doucement je négocie un premier virage sans tomber puis un second. Je me sens ragaillardie après ces deux premiers succès !!

Je me lance, eh oui ! J’ose. Je glisse, je skie, la vitesse me grise. D’accord vitesse est un bien grand mot, mais j’y vais, tout schuss ce sera pour plus tard !!Mon ski gauche cogne violemment sur mon ski droit, quelle drôle d’idée ! J’arrive en bas de la pente la tête la première sans ski ! Rien de cassé, je me relève, je ressemble à un bonhomme de neige !

Je regarde la queue au pied du téléphérique ! Ce ne sera pas pour demain !!! Le tire-fesse m’attend !!! Pourvu que je ne rate pas mon coup cette fois-ci !!

 

Christine

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Marcel s'agrippe au tire fesse tant bien que mal : qu'est-ce qu'il lui a pris de suivre les conseils de la marquise de saint Euverte ? Bien sûr que le froid, la neige, le sport lui feraient du bien ! Les crises d'asthme s'espaceraient miraculeusement comme aspirées par les bâtons des skis !

« aie » cette fois c'est le genou gauche qui a subi le choc! Aie ! Aie,

 

Marcel a froid, sa doudoune est déchirée, qu'est-ce qu'on peut être maladroit avec des gants rembourrés ! Les jeunes filles en flocons le regardent en riant : pas moyen de tenir debout sur des maudites planches ! Albertine, Andrée, slaloment à toute vitesse, le frôlent, lui coupent la piste, il se retrouve par terre et glisse tant bien que mal jusqu’à la vallée, sur les fesses ! Et ben Marcel ! Qu'est ce qui t'arrive, t'es a la recherche des bâtons perdus ?

 

Marcel se relève péniblement, grelotte, s’étouffe, crache, pleure, entre lui et Albertine la fracture est désormais inévitable ! Il va envoyer un bleu au Ritz en ordonnant qu'on vienne le chercher immédiatement ! Il monte précipitamment dans sa chambre d’hôtel, Françoise comprend, ça va barder, elle lui prépare un thé bien chaud avec des petites madeleines, si seulement les réminiscences pouvaient le calmer !! une, deux, trois quatre couvertures plus tard ! Un deux trois quatre oreillers entassés comme un nid douillet sous sa tête en feu ! L'effet de la petite madeleine commence à se faire sentir, il revoit la maison de sa tante Léonie, mais emmitouflée dans la neige ! Un immense téléphérique transportant sa grand-mère, sa mère, Françoise et toute sa famille, se décroche soudainement et va s’écraser sur le toit de la maison. Il sonne : Françoise arrive en courant,

 

J’avais dit pas de thé à la bergamote !

 

Louis

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Addis Abeba01 (Sam Effron)

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La médaille d’or

 

Le tire-fesses n’a pas besoin d’être vérifié, il est ultra moderne. Depuis le début du 21ième siècle, les chinois n’arrêtent pas d’investir en Ethiopie et de transformer sa capitale, Addis Abeba  en une mégapole tentaculaire où se déroulent, aujourd’hui, à l’aube du 22ième siècle, les jeux olympiques d’hiver. A l’aide de canons à neige ultra performants, le mont Entoto a été transformé en un impressionnant domaine skiable. Où est la vaste forêt d’Eucalyptus abritant les monastères, où sont les souvenirs du couronnement du roi Ménélik II ? Enfouis sous des tonnes de bâtiments futuristes et incongrus, sur cette terre où il y a 100 ans, on vivait encore dans les campagnes comme au Moyen-Age.

 

Il fait froid ce matin quand Florent sort de l’hôtel et il a mis sa doudoune la plus chaude. Il se rend à la patinoire olympique pour s’y entraîner. Rendez-vous compte, il fait partie de l’équipe de France de patinage artistique et ce soir participe à l’épreuve programme libre hommes. Florent est séduit par la foule dense et colorée qui se presse dans les rues et stupéfait de l’intense circulation qui y règne. Il y a des adversaires redoutables dans l’équipe éthiopienne. Eux qui étaient champions de course à pieds, tellement habitués à parcourir des kilomètres dans leurs montagnes par tous les temps, sont devenus des patineurs émérites qui seraient capables de remporter des médailles d’or. Leur seule faiblesse est leur paresse ancestrale qui les empêche parfois de s’échauffer suffisamment et pourrait les exposer à une éventuelle fracture.

 

En laissant ainsi cheminer sa pensée, Florent arrive à la patinoire. Ce soir, c’est la dernière épreuve qui peut lui permettre de rapporter une médaille d’or à la France. Le temps passe en entrainement intensif, léger repos et déjà l’heure de la compétition arrive. La tension monte mais Florent est prêt. C’est à lui. Une respiration, concentration maximum et il s’élance tel un oiseau volant harmonieusement au-dessus de la glace. Le silence est palpable, les yeux, braqués sur lui. Une merveille cette prestation……et des notes en rapport.

 

Le téléphérique s’est arrêté faute de candidats à l’ascension de l’Entoto, tout le monde étant à la patinoire en attente des résultats. Le score va être affiché :

Médaille d’or, Florent Duval France

Médaille d’argent, Ismaël Takara  Ethiopie

Médaille de bronze, James Davies  Etats-Unis

Hourrah, Florent, qui en avait tant rêvé, pleure de joie. Son travail et son courage sont récompensés. L’esprit de son arrière grand-oncle, qui a vécu un temps à Addis Abeba dans sa jeunesse, a dû l’inspirer pendant sa prestation. L’année 2095 est son année !

 

Gill

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