Phrase extraite de "Peste et choléra"

 

Ecrire sur un papier des  mots en rapport avec le mouvement

Faire passer le papier à sa voisine qui en choisit un dans la liste. Ecrire un texte contenant les mots sélectionnés et commençant par « ce n’est pas une vie que de ne pas bouger » : Patrick Deville « peste et choléra » (Phrase extraite de la correspondance d’Alexandre Yersin).    (20-25 mn)

 

les trois mots:                            sautiller    danse    tourbillon

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« Ce n’est pas une vie que de ne pas bouger » se disait Hélène, clouée dans un fauteuil roulant depuis son accident de patinage. N’imaginez pourtant pas Hélène transformée en légume comme certains d’entre nous à l’apparence physique dite normale mais enfermés par une absence de curiosité, de motivation, au cerveau aplati.

 

Hélène bouillonnait secrètement derrière ses lunettes qui accentuaient son air mutin. L’œil étincelait de malice et de grâce. Elle écrivait passionnément des poèmes ainsi que des nouvelles qui avaient toujours une fin heureuse.

 

Depuis quelques semaines, elle s’était lancée dans l’écriture d’une chorégraphie échafaudée à partir de ses rêves. Un spectacle de danseet de tourbillons pour le prochain gala de patinage artistique patronné par une célèbre marque de parfums. Elle imaginait un couple féérique virevoltant sur la glace transformée en tapis par les éclairages. Elle voyait l’homme sautiller après ses doubles axels pour rejoindre la belle. Mozart accompagnait les prouesses de façon magnifique. Hélène n’était plus alors dans son fauteuil roulant mais dans la patinoire, virevoltant comme un papillon. Hélène ne savait plus alors ce que signifiait « ne pas bouger » car, en elle, tout était mouvement. L’apparence physique de sa vie avait changé, mais son bouillonnement  intérieur était devenu intense.

 

Mouty

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« Ce n’est pas une vie que de ne pas bouger » ; Oh ! comme c’est vrai se dit le petit chien blanc et marron, dans la vitrine des galeries Lafayette. Il fait partie du décor de Noël, superbe, comme tous les ans, imaginé par les grands magasins parisiens, pour le plaisir des promeneurs et des touristes. Mannequin parmi d’autres, il est là, à côté d’une fillette et d’un garçonnet près d’une cheminée entourée de cadeaux et tout autour d’eux, des animaux variés dans un décor neigeux où brillent des dizaines d’étoiles.

 

La nuit est tombée et notre petit chien se met à rêver de mouvement, de visite de monuments, de promenade dans Paris……et il rêve si fort que tout à coup, une patte se soulève, puis deux, puis ses yeux bougent et sa tête tourne. Il se met à sautiller dans la vitrine, se sent prêt à entrer dans la danse, entraîné dans un tourbillon d’excitation et de joie.

 

Bientôt, sans savoir comment, il se retrouve sur le trottoir et commence alors une folle équipée dans les rues de Paris qui l’emmène de l’Opéra au Sacré-Cœur en passant par les Invalides, le parc Monceau et Notre Dame. Là il se retrouve bientôt sur les berges de la Seine, dans un endroit bien moins élégant où des silhouettes emmitouflées dans de vieux vêtements crasseux, des bonnets enfoncés jusqu’aux yeux, présentent des mains endolories par le froid à des chaufferettes bancales. « Qui sont ces gens ? » Se dit le petit chien. « Ne serait-ce pas ce qu’on appelle des SDF ou clochards ? J’en ai vu quelquefois passer furtivement devant la vitrine ». Il s’approche pour mieux voir mais aussi parce qu’il a faim et soif et renifle des odeurs alléchantes ; plusieurs paires d’yeux étonnés se tournent vers lui, il recule, craintif, quand des mains rudes mais douces à la fois le soulèvent puis l’approche d’une gamelle contenant une mixture inconnue mais odorante. En cet instant, il sait qu’il restera là, avec  ceux qui l’accueillent et partagent leur pitance avec lui. Peut-être ne bouger-t-il plus, mais ce sera son choix, et alors il  pourra dire : la vie peut être belle sans bouger quand on est en bonne compagnie.

 

Dans la vitrine des Galeries Lafayette, il y a une place vide près de la fillette, ce qui fait dire aux passants : « Le décorateur aurait dû faire plus attention à cette vitrine ; les personnages sont mal installés ; on a l’impression qu’il manque quelque chose ! »

 

     Gill

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