Chacun sa consigne (2)

 

Trouvez des noms d’animaux commençant par chacune des voyelles.

  En 30 minutes, imaginez une histoire mettant en scène ces six animaux.

------------------------------

 

-Aliboron, mon âne, à quoi penses-tu derrière ton œil de velours ?

-Je profite du moment, mon bon petit maître. J’ai appris que je pouvais être taillable et corvéable à merci. Dans l’espoir de ne jamais connaître ces jours maudits, je profite de ta douceur, de ton innocence, souhaitant finir ma vie dans ton giron. Tu es mon prince attentionné. Je t’adore. Je suis prêt à te suivre partout sans que tu aies besoin de me brutaliser.

 

-Ephémère, je suis le minuscule papillon bleu qui inspire vos rêves quand vous me prêtez attention. Faîtes vite, je n’ai qu’une journée pour cela : ma vie est courte et légère !

 

L’iguane me regarde d’un air attentif, roulant son œil démesuré dans son orbite mobile.

-Auras-tu bientôt fini de me mater ? me dit-il. On dirait que tu n’as jamais rien vu. Tu ne fréquentes pas beaucoup les zoos apparemment, ni les pays tropicaux. Il faut sortir, ma fille, ton regard sera un peu moins idiot. Et puis, basta ! Je me tire !

 

Le Père-Noël souhaiterait changer son caribou fatigué. Il hésite entre l’orignall’ure et le yack.

L’orignal du zoo, se redressant dans la savane reconstituée : - Pas de blague avec moi, je suis habitué aux pays chauds, et non aux hivers nordiques. Je n’ai pas envie de finir ratatiné comme un glaçon !

L’ure, depuis sa vitrine du musée préhistorique où il trône depuis bon nombre d’années, l’interpelle : - Hé, Père Noël, ne cherche pas trop ! Il y a longtemps que je ne suis plus sur terre. Sans descendant, de surcroît ! Laisse-nous dormir en paix. Nous avons fait notre temps. Je crois bien que toi aussi d’ailleurs…

Le Yack, quant à lui, s’enfuit à toute bringue : - Trop peu pour moi, je n’ai pas envie de m’éreinter pour d’affreux gamins qui ne savent plus apprécier les choses simples et sont imbus d’un orgueil mal placé par rapport à la taille ou au prix des cadeaux reçus. Pas envie de me transformer en larbin de petites fripouilles. ET puis, j’ai à faire au Népal. Salut Père Noël, je ne te dis pas « A la prochaine » !

 Mouty

___________________________________________

 

 

Kidnapping

 

« Mais il fait noir comme dans un four ici ! Et je me cogne partout ; on ne peut même pas voler ! » Glapit une voix éraillée. L’ara vient de se réveiller et il a l’impression d’être brinqueballé d’un côté à un autre à tel point qu’il en a mal au cœur. Est-il seul dans tout ce noir ? En tout cas, il n’y a rien en hauteur, il le sentirait.

 

Ses yeux s’habituant au manque de lumière, il distingue par terre des formes qui commencent à s’agiter. Un ours déplie son grand corps et se dresse sur ses pattes arrière tellement vite qu’il se cogne la tête au plafond ! Poussant un grognement mécontent, il entend une petite voix qui lui dit : «Attention, gros lourdaud, tu vas m’écraser ! » Un bébé iguane, tout proche d’une de ses pattes se met à l’abri à toute vitesse dans un coin ; puis yack et ure, proches parents, se lèvent à leur tour, un peu hébétés, quand soudain une sorte de serpent vertical monte vers l’ara qui essaie toujours de voler. La trompe en l’air, l’éléphant se dresse et tous les autres se retrouvent coincés contre des parois. « Te gêne pas, prends toute la place, lui disent-ils en chœur. »

 

« Allons, allons », dit-il, semblant plus raisonnable que les autres, « que nous est-il arrivé ? On nous a endormis et capturés pour nous emmener en captivité dans un de ces zoos ou cirques, censés plaire aux enfants ; Nous sommes dans un camion, sur une piste, si j’en crois les chaos. Ne vous tracassez pas et unissons nos efforts. Quand ils vont venir voir si nous dormons toujours, pour passer la frontière en silence, faisons le mort pour les laisser s’approcher assez près, et sautons leur dessus. »

Ecoutant ces sages paroles, tout le monde se calma, l’ours et l’éléphant se couchèrent en essayant de se faire les plus petits possible, suivi des quatre autres, le bébé iguane n’ayant aucune difficulté à passer inaperçu. Quelques chaos plus loin, le camion s’arrêta et comme prévu, des voix se firent entendre, la lourde fermeture de la porte grinça et un rai de lumière pénétra l’obscurité. Tous leurs muscles bandés, les six compères firent silence, attendirent l’ouverture complète des portes, la confiance de leurs ravisseurs, et passèrent à l’attaque : rapide comme l’éclair, la trompe de l’éléphant s’abattit sur la tête de l’un, la patte griffue de l’ours donna une formidable gifle sur la joue de l’autre et les ruades du yack et de l’ure endommagèrent la mâchoire du troisième. Resta à l’ara à voleter autour du trio pour l’affoler tandis que le bébé iguane fila en premier entre leurs jambes.

 

Tout ce petit monde, libéré, s’enfuit à toutes pattes dans la forêt accueillante qu’ils n’avaient pas encore quittée, se promettant de se retrouver bientôt, une fois tout danger écarté.

 

Gill

______________________________________________

 

 

Dialogue de bêtes. 

 

         La tempête se déchainait, entrainant une effroyable panique à bord. Le pauvre Noé ne savait plus où donner de la tête tandis que sa femme commençait à sérieusement regretter de l’avoir suivi dans cette aventure improbable, en faisant fi des conseils de tout leur entourage…Quant aux animaux, n’en parlons pas ! Du pont à la cale, de bâbord à tribord, l’Arche en folie ressemblait de plus en plus à l’Enfer de Dante ; sauf que ce dernier ne naitrait que dans des  centaines de milliers d’années mais il n’est jamais trop tard pour bien faire.

 

          Seul un petit groupe, d’une douzaine de sujets, vraisemblablement gratin de cette société, se tenait à l’écart du tumulte, la poupe étant, il est vrai, l’endroit du navire le moins arrosé, au regard des circonstances.

 

        L’on pouvait distinguer six couples, depuis les antilopes jusqu’aux yacks en passant successivement par les éléphants, les iguanes, les ocelots et enfin les ures (que la courageuse entreprise de Noé ne sauverait pas, hélas, bien que ce dernier l’ignorât).

         Tout ce petit monde était fort occupé à disputer une partie de cartes acharnée, ancêtre de toute évidence du poker, ce qui avait pour avantage de les couper un tantinet de la réalité.

         La vérité oblige à préciser que seuls les mâles jouaient, tandis que leurs épouses devisaient gaiement, en jetant de temps à autre un œil sur la partie en cours.

          «- Alors comme ça, susurra Dame Iguane à son homologue Ocelot, vous avez franchi la barre des soixante-dix kilomètres/heure !! Mais c’est positivement fantastique !

             - Oh, c’est bien peu de choses, je suis sûre que Dame Antilope a battu ce record, n’est-ce-pas ?

              -En effet. (Et tournant aussitôt la tête) Mais dîtes-moi, Dame Eléphante, vous croyez que ce fameux Noé, que personne ne connait d’ailleurs et me parait se révéler bien piètre marin, ce Noé donc a su construire un vaisseau capable de résister à aux tempêtes bien que  transportant  des personnes assez corpulentes…ceci dit sans offense de ma part…

      - Il n’y a pas de mal, d’autant que mon mari et moi ne sommes pas les plus imposants ! Voyez les baleines !

       - C’est vrai, s’exclama Dame Ure, je ne vois pas du tout pourquoi elles ont été sélectionnées ! Leur bassin occupe à lui seul le tiers du navire, c’est une honte ! A cause d’elles, nous sommes tous serrés…

        - Comme des sardines ! Ne put s’empêcher d’ajouter en s’esclaffant Dame Yack dont la solide réputation de pitre et de boute entrain s’était consolidée durant le voyage. Enfin, dès que nous serons arrivés, je vous invite tous à l’énorme Garden Party que mon mari et moi comptons organiser, pour fêter l’évènement…

          - Et ce ne sera que justice, persifla Dame Iguane toujours un peu acide, car votre Yack de mari est entrain est en train d’allègrement plumer les nôtres, je vous le signale, Mesdames ! »

           Avec sa diplomatie coutumière, Dame Antilope entreprit de changer de sujet. Levant vers le ciel ténébreux ses beaux yeux alanguis elle soupira : « C’est long, long, ce voyage, vous ne trouvez pas ? Et cette maudite pluie, qui n’a pas cessé un seul instant depuis notre départ, ça fait combien de temps au fait ?

             _ Quarante jours répondit une voix profonde, provenant d’au-delà des nuages. »

                  Et le soleil apparut soudain.

 

    El Pé

__________________________________________________