Autour du goût

 

 l'atelier s'associe à la semaine du goût en proposant la consigne suivante

 

Choisissez un mot en rapport avec le goût (ustensile de cuisine, appareil électroménager, ingrédients, etc….) et révélez-le à l’assemblée.

De même, choisissez un autre mot et écrivez-le sur un papier ; Mettez les papiers au centre de la table.

Commencez votre texte en rapport avec le goût avec le premier mot choisi. Toutes les 5 minutes, un participant tire un papier, livre le nom qui y est inscrit et chacun l’incorpore dans son récit dans les 5 minutes qui suivent. Ainsi de suite jusqu’à épuisement des papiers.

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Mon petit  robot magique, quel plaisir je prends à t'utiliser, grâce à toi je gagne un temps fou et je peux tellement en mélanger des ingrédients, ils tournent, dansent, se font malaxer, broyer, pulvériser, pour faire ressortir tous les arômes, avec les différents goûts qui vont délicatement apporter une délectation à mon palais, titiller mes papilles enchantées , me faisant monter l'eau à la bouche ;  je me sens gonflée de joie quand je vais poser sur la table joliment décorée cette préparation . Mais tu as une assistante que je ne peux oublier, aide précieuse, la planche à découper  attend de recevoir la succulente entrée qui aura refroidi et pris la bonne consistance au réfrigérateur  pour se faire trancher en parts les plus égales possible, le couteau à large lame ne devra laisser échapper aucun morceau du mélange imprégné d'olives que le dénoyauteur s'est empressé avec dextérité de faire glisser le noyau  hors du fruit, ne laissant que la chair moelleuse et juteuse à souhait dans la préparation somptueuse de cette entrée; bien sur elle n'aura  pas nécessité la gousse de vanille des îles qui tristement regarde avec envie, se demandant quand viendra son tour ; mais je la rassure  : « bientôt se sera à toi de faire partie d'un met et, un plus pour toi, tu pourras te blottir dans un moule à tarte glissé dans la chaleur d'un four qui te fera rougir de plaisir, te gonflera, faisant entendre des clapotements, des grésillements de contentement, pour donner du bonheur à tout une tablée, avide de se délecter de tous tes délicieux parfums »  .  

 

                     Rina 

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Je suis très fier, moi le piano, de trôner dans cette superbe cuisine du célèbre restaurant Maxim’s. Oui oui, le piano ! Oui oui, dans la cuisine ! Il faut savoir que dans l’argot -si l’on peut dire- des gens de bouche, un piano est une très large cuisinière avec plusieurs plaques de cuisson et fours, permettant de faire de la cuisine élaborée, à grande échelle. Je suis ici le souverain qui blanchit, mijote, réduit, cuit, frit ; du chapon à la brioche, de la sauce poulette au pâté de lièvre, je suis le virtuose de la juste cuisson. Sans moi, point de repas gastronomique, ni de combat de chefs, comme aujourd’hui, dont le meilleur sera récompensé par une toque de platine.

 

Les planches à découper, en face de moi, sont rangées comme un bataillon en attente de l’assaut final. Elles essuieront bientôt un salve de coups de couteaux qui couperont, hacheront, éminceront, cisèleront pour permettre aux parfums subtils des aromates de s’exhaler. Pour l’instant, tout est encore en sommeil avant l’arrivée des toqués étoilés, prêts à la compétition.

 

Les dénoyauteurs, tout petits dans leur tiroir, piaffent d’impatience. Ce n’est pas leur petite taille qui en fait des inutiles, loin de là. Rendez-vous compte du temps qu’ils font gagner et de l’art avec lequel ils présentent des fruits élégants, olives, cerises et autres, qui garniront pâtés, feuilletés et tartes. Imaginez le drame si l’un des convives se cassait une dent sur un noyau  récalcitrant et oublié. On a déjà perdu un concours pour moins que cela !

 

Au fait, où sont passées les gousses de vanille, celles de Madagascar qui sont les plus odorantes ? Ah, là, dans ce grand bocal en verre fumé. Elles seront toutes utilisées, c’est certain, pour la préparation de ce flan succulent, tout simple censément, mais aux ingrédients si subtilement dosés, qui fait la renommée du chef L…, bien connu en Bourgogne, à moins qu’elles ne soient partagées pour parfumer la pâte pétrie avec art qui garnira les moules à tarte.

 

Bon, chacun est en place, en attente de servir pour faire chanter les papilles des gourmets,  peut-être aussi gourmands. Les portes battantes vont s’ouvrir : messieurs les toqués, au travail, régalez-nous !

 

     Gill

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Nous avions décidé de faire des pâtes. C’est convivial, nourrissant, facile surtout. Et notre génération soixante-huitarde n’engendrait pas tellement de cordons bleus. En tout cas, dans notre groupe d’étudiants, nous n’en connaissions pas.

 

    Bien. L’eau bout, les spaghettis sont prêts, autrement dit le sachet de Lustucru est déjà ouvert et le morceau de gruyère gît sur la table.

 

     Mais… la râpe à fromage ? Où est la râpe à fromage ? Panique à bord. On ouvre tous les tiroirs, on fouille tous les placards. Pas de râpe à fromage. Drame.

 

      « Ne nous affolons pas, décrète Marie-Jeanne une fille d’à peu près un mètre quatre-vingt, ce qui, évidemment impose tout de suite l’écoute- ne nous affolons pas. Roland, va chercher la planche à découper, là ! Juste derrière-toi sur l’évier ! Allez les garçons, chacun son couteau suisse et faites-nous de jolis petits cubes, hein ? »

 

     C’était très amusant .Nous les filles, les regardions faire et les encouragions en chantant en chœur du  Bob Dylan .Chouette ambiance.

 

      Nous n’avions certes pas trouvé de râpe à fromage, en revanche, un tas d’autres ustensiles jonchaient ce qui pouvait s’apparenter à un plan de travail. Jean-Pierre, le plus inventif de la bande, se saisit soudain d’un dénoyauteur avec un cri de triomphe et entreprit de nous expliquer que les cubes seraient plus arrondis( ?), donc plus appétissants a priori, en se servant du dénoyauteur comme d’un poinçon à tickets de métro (Ah ! Nostalgie !). Sitôt dit sitôt fait et une série de petites olives fromagères commencèrent à s’empiler dans le bol. Du plus bel effet.

 

       Tout au fond d’un placard, Paquita, une jeune Argentine mi étudiante en Arts Plastiques mi réfugiée politique dénicha un bâton de vanille. « Manifico !!! »S’écria-t-elle, et sans nous demander notre avis, elle le jeta dans l’eau bouillante, suivi immédiatement par les spaghettis. « Recette de gaucho (on a tous dû faire un contre-sens, je présume), mucho bueno !!! »

 

    Nous étions jeunes, nous étions fous ! Nous l’avons crue sur parole.

 

Dans la foulée, personne n’a pensé à saler l’eau, mais quelle importance !

 

         Le temps de chanter « La mauvaise réputation «  et « Santiano », les pâtes étaient prêtes. Comme nous n’avions pas trouvé de plat non plus, nous les avons servies dans un moule à tarte dont le diamètre dépassait facilement les cinquante centimètres, vestige à n’en pas douter d’une civilisation inconnue. Vous dire que nous nous sommes régalés serait très exagéré mais nous avons cependant fini le plat. Puis, le temps d’un   petit hommage à Nicolas and Bart, et nous avons sagement été au lit.

 

            Car le lendemain, dès quatre heures, nous attaquions le Pic Saint Loup. Par la face nord !

 

              El Pé

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JOURNEE CONFITURE

 

Quatre coups de cuillère en bois sont donnés sur le bord du chaudron. C’est le signal immuable de ma mère marquant la fin de cuisson de la confiture. L’odeur des poires cuites envahit la maison. J’en ressens déjà le goût sur le bord de mes lèvres, sur ma langue… Mes rêves d’enfant se perpétuent au travers d’un arôme ancestral qui planait dans la maison déjà du temps de ma grand-mère.

 

Ma mère pose le chaudron sur la planche à découper installée sur la table, à côté des pots étincelants, attendant leur remplissage. Le parfum de poire cuite emplit mes poumons qui savourent en même temps que mes papilles.

Le dénoyauteur est resté en attente sur le bord de l’évier. Ma mère avait envisagé de mélanger quelques cerises gardées précautionneusement au congélateur, mais, au dernier moment, elle s’était décidée pour des noix qui accorderaient mieux leur côté craquant et leur saveur à celle des poires. Elle avait aussi ajouté deux gousses de vanille ramenée de La Réunion par ma sœur. Elle les avait fendues avec le petit couteau à éplucher et en avait gratté les graines minuscules qui s’étaient disséminées dans la marmelade onctueuse.

 

Pour marquer cette journée confiture ma mère avait fait une pâte qu’elle avait disposée dans le moule à tarte, puis garnie, bien sûr, avec des quartiers de poires, des noix, et parsemée aussi de vanille. L’odeur venant du four prit le relai de celle montant du chaudron, et un goûter délicieux agrémenté de tarte et de chocolat chaud vint ponctuer cette journée mémorable.

 

Mouty

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